Etonnamment, le monde de la culture n’a que partiellement saisi l’opportunité de l’explosion des données de masse, ou big data, et les grandes institutions culturelles n’ont pas encore redéfini leurs missions et leurs responsabilités vis-à-vis de la nouvelle culture de la data, produit d’un monde de plus en plus dirigé par les données personnelles.
(...) La data s’intègre à notre patrimoine commun et à un système de références constitutif de nos identités individuelles et collectives. Elle émerge comme culture à part entière.
(...) C’est aussi un enjeu business, car les datas ouvrent une multitude d’opportunités. A l’image des grands projets de transformation des villes qui donnent une occasion unique d’allier culture et data dans la logique des « smart cities ». Depuis l’implantation réussie du musée Guggenheim à Bilbao, des projets communs entre villes et représentants de l’univers culturel se font en effet de plus en plus nombreux et de plus en plus autour de la data : c’est le cas de Data Drives, établi par le MIT Senseable City Lab au National Museum de Singapour ou du guide interactif pour les œuvres du Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de la ville de Nice. A l’image également du grand succès d’un acteur comme Netflix, lié non pas uniquement à son catalogue de contenus mais à sa capacité à analyser le comportement de ses utilisateurs pour constamment leur proposer de nouveaux contenus.
Il s’agit ainsi pour les acteurs de la culture de devenir, dans le premier cas, des interlocuteurs crédibles et, dans le second, de super-data-utilisateurs. Être crédibles pour tous ceux qui portent des projets en lien avec les data, cela passe par une formation initiale et continue qui intègrent à leur juste place les data sciences. Devenir de super-data-utilisateurs, c’est générer ses propres données, être capables de les réutiliser, maîtriser les algorithmes et assurer la vérifiabilité des résultats.
(...) Si les industries et institutions de la culture relèvent le défi de la culture de la data, elles auront également vocation à dépasser leur périmètre sectoriel pour s’exprimer sur la finalité des données. Pourquoi une ville comme San Francisco, berceau des grandes technologies qui font miroiter aux citadins une qualité de vie améliorée, est aussi une des villes où il y a le plus de congestion ? Est-ce que la donnée ne doit pas en priorité résoudre le problème des embouteillages ?