Dans les années 1950, l'anthropologie structurale a montré que, dans certaines organisations humaines, coexistaient
deux modes de pensées : la pensée rationnelle (ou technique) et la pensée sauvage. Pour Claude Levi-Strauss, cette dernière n'est pas la pensée des sauvages, ni celle d'une humanité archaïque, mais la pensée à l'état sauvage.
De nos jours, la pensée sauvage assure la cohésion des collectifs humains et la pensée technique, l'organisation des échanges et de la production ainsi que la mise en œuvre du progrès technique et scientifique. La prise en compte de la pensée sauvage est nécessaire à la réussite du changement dans l'entreprise.
Nous sommes parfaitement aptes au changement. C'est précisément la culture qui permet à l'homme de s'adapter où qu'il aille. Mais en respectant son temps logique propre - par opposition au temps absolu - lui permettant de prendre conscience, de maturer inconsciemment et de prendre acte consciemment du changement. Comme c'est la pensée sauvage qui dicte le rythme de ce temps logique, c'est véritablement elle qui promeut, qui traite le changement. Lorsque l'entreprise se repose totalement sur la pensée technique, elle court à l'échec.
Par exemple, l'Office national des forêts était doté d'une culture administrative particulièrement forte où depuis le XIIIe siècle, la forêt ne devait être ni cultivée ni exploitée et les manants devaient en être chassés. Cet état d'esprit diffère beaucoup de celui d'une société pour laquelle la forêt est un bien exploitable. Changer la vocation de «la forêt pour le Roi » à « la forêt pour le peuple » était une révolution. Mettre cela à jour a permis de rationaliser cette dimension culturelle, ce qui était nécessaire pour fonder un modèle économique. Comme il y a toujours une mission sacrée, même si elle est nouvelle, la cohésion sociale est préservée.