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« PETITS ÉCRITS » SUR LE MANAGEMENT : le blog

Le diktat du process : ce mal nécessaire. Mais en mieux si possible.

Vive les process. Mais point trop n’en faut. A l’heure du tout-process, il faut peut-être apprendre à leur accorder une place secondaire, pour reprendre le contrôle. Immuables ? Rendons-les éphémères.

Grandes ou petites, les entreprises ont massivement structuré leur fonctionnement, leurs routines, depuis longtemps. Mais depuis 10 ou 20 ans, un palier supplémentaire semble avoir été franchi puisque l’absence de procédure cadrée est aujourd’hui suspecte. Comme le diable, qui se niche dans le détail, la procédure atteint parfois des sommets de précision : il existe des manuels de téléconseiller qui précisent qu’il faut dire bonjour à son interlocuteur (quand ils n’expliquent pas comment il faut dire bonjour).

On peut y voir une prise de pouvoir des technostructures de l’entreprise. On peut y voir aussi la montée d’une douloureuse emprise du réglementaire. Mais ce serait considéré l’absence de capitaine. Car si les process sont là, omniprésents, à exiger du comment la machine doit faire ceci et cela, c’est bien parce qu’un individu ou un comité l’a décidé. Il y a toujours quelqu’un pour décider de faire ou ne pas faire. 

Cela répond probablement à un besoin irrépressible de contrôler. Il faut être fiable : dire ce qu’on fait, faire ce qu’on dit. C’est tout de même rassurant de penser que tout est programmé, que, quoi qu’il arrive, l’organisation a une réponse.  Même si tout manager sait parfaitement qu’il passe une part significative de son temps à gérer des imprévus : la grippe et l’absence d’un collaborateur, la demande d’un délai additionnel d’un client, le report d’une réunion, le blocage d’un itinéraire pour cause de grève ou tout simplement pour travaux.

Alors aujourd’hui, il lui faut savoir être rond et carré à la fois, prôner le flexible, mais pas trop, et tout à la fois le rigide, mais pas trop.

Les petites start-up comme les grosses sociétés technologiques (Google, Apple, …), réputées innovantes et agiles, n’échappent pas à cette nécessité de dicter et d’écrire leurs règles. Mais peut-être s’y prennent-elle différemment ? Ou peut-être considèrent-elles implicitement qu’une procédure est par nature éphémère, vouée à être changée rapidement. Mais des bataillons d’entreprises préfèrent ancrer le « c’est ainsi », sous-entendu « et pas autrement ». Elles choisissent d’investir, non pas le sujet, sur le fond (combien de procédures formalisées sont en définitive idiotes ?), mais dans le sujet, en formant une cohorte de « business analysts » quand ce n’est pas en créant une direction ou un département de la gouvernance.

Mais la carte n’est pas le territoire. Le dikat du process en amène beaucoup à confondre les 2, voire à penser que la carte prévaut sur le territoire. Les plus radicaux vous expliqueront que toute activité peut rentrer dans le moule d’un process alors qu’il en existe, comme l’enseignement, la recherche (ou l’élaboration d’une newsletter éditoriale) et bien d’autres qui n’accepte pas la mise en carte, où tout du moins dont la représentation en séquences ou cycles reste très éloignée de la réalité.

L’entreprise du XXIe siècle, petite ou grande, est nécessairement malléable, reconfigurable, changeante, adaptative. C’est pour cela que sa carte doit rester éphémère, parfaitement jetable, pour être redessinée encore et toujours. Il faut donc savoir désinvestir du process pour réinvestir le territoire en rendant ses processus « responsive », lorsqu’il est nécessaire de les formaliser, donc fixés sur l’essentiel, et en acceptant qu’ils ne sont eux-mêmes que très accessoires dans la marche de l’entreprise.

Laurent HOUMEAU



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