L’affirmation par certains auteurs que les tableaux de bord, réunissant des données financières et des indicateurs d’activité, existaient en France bien avant tout le monde est loin d’être étayée historiquement. Il en est de même de l’implication particulière des ingénieurs dans leur élaboration, y compris dans des entreprises industrielles.
Les années 20 sont propices aux grandes entreprises, et à la multiplication de leurs filiales : comment les contrôler ? Les dirigeants collectent de l’information à travers d’un « journal de marche », essentiellement rédigée sous une forme narrative. Les « statistiques » arrivent entre les deux guerres, mais c’est le contrôle budgétaire qui sera adopté … et qui décevra.
Les tableaux de bord arriveront vers 1960 avec un glissement certain vers le reporting financier. L’histoire des tableaux de bord est dominée par l’ambiguïté de l’objectif et les aspects pratiques de la collecte d’informations (machine à écrire, mécanographie). Le premier tableau de bord de Saint-Gobain comporte trois classeurs, celui de Pechiney huit, et
celui de Lafarge intègre certains graphiques peints à la main …
Le tableau de bord est un mode de représentation qui recouvre des choix. Ces dirigeants « historiques » connaissaient intimement les activités de leurs entreprises. Pour apprendre à voir à travers un microscope, il ne suffit pas de regarder, il faut faire. Pour distinguer un grain de poussière de la glande salivaire d’une drosophile, il faut en avoir déjà disséqué.